Extrait : La Horde du Contrevent d’Alain Damasio

11 déc. 2024

) Caracole s’est levé pour jouer du cromorne. Il entame une mélodie agitée puis l’allège et l’harmonise, se rassoit, semble entrer en lui-même et pose tranquillement son instrument, en nous dévisageant gravement. Lorsqu’il reprend la parole, son ton est simple et direct:
—N’acceptez pas que l’on fixe, ni qui vous êtes, ni où rester. Ma couche est à l’air libre. Je choisis mon vin, mes lèvres sont ma vigne. Soyez complice du crime de vivre et fuyez! Sans rien fuir, avec vos armes de jet et la main large, prête à s’unir, sobre à punir. Mêlez-vous à qui ne vous regarde, car lointaine est parfois la couleur qui fera votre blason. Il marque une ultime pause, ses yeux rivés dans les nôtres, comme s’il y cherchait un écho impossible, une fraternité de résonance qu’aucun de nous ne peut lui offrir, là où il la rêve — ou l’attend. Il se lève, en faisant claquer rythmiquement ses syllabes, et il achève:
— Le cosmos est mon campement.
La Horde du Contrevent Alain Damasio

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